InternationalSociété

Thierry Breton : « Il sera inévitable de se poser la question d’un porte-avions européen »

[ad_1]

Lors d’un discours prononcé à l’occasion de l’ouverture de la troisième conférence européenne de défense et de sécurité, ce 10 octobre, le commissaire européen au Marché intérieur, Thierry Breton, a estimé qu’il n’y a pas d’autre choix que « de tirer d’urgence toutes les conséquences » du « changement de paradigme » provoqué par la guerre en Ukraine.

Aussi, pour M. Breton, la « seule priorité » est d » »accroître notre préparation à la défense, gage fort de notre sécurité collective », ce qui passe par une « nouvelle stratégie européenne pour l’industrie de défense claire ». Et d’insister : « Un environnement géopolitique fondamentalement modifié exige que les Européens deviennent plus affirmés, plus réactifs et plus agiles . Et moins dépendant de nos alliés ».

Pour cela, le commissaire au Marché intérieur a défini trois orientations. Ainsi, il s’agirait de « mieux investir sur les enjeux prioritaires et les capacités indentifiées avec les États membres », d’européaniser la demande, via des achats en commun, et de renforcer l’industrie européenne de l’armement tout en veillant à éviter de nouvelles dépendances. Des outils permettent déjà de le faire… Mais pour M. Breton, ils peuvent encore être améliorés.

Tel est ainsi le cas du Fonds européen de défense [FEDef]. « Il est nécessaire […] d’introduire un pilotage stratégique du Fonds, avec une fonction de programmation et de planification », a dit le commissaire européen au Marché intérieur, pour qui une telle « évolution est cruciale ».

Mais au-delà de ces aspects industriels, M. Breton est allé sur le terrain opérationnel, en citant le cyber [via la proposition de créer une « infrastructure européenne pour la détection avancée des cyberattaques »], l’espace [« nous devons avoir les moyens de défendre nos intérêts stratégiques et de protéger nos infrastructures spatiales », a-t-il dit], l’aérien [avec la mise en place d’un « Eurodôme », c’est à dire un « bouclier européen de défense aérienne et antimissile »] et le maritime.

L’Union européenne « disposant de la plus grande zone maritime exclusive [ZEE] au monde, nous devons renforcer notre capacité de surveillance de cet espace contesté, notamment en ce qui concerne la protection des fonds marins et des infrastructures critiques qui les composent », a plaidé M. Breton.

Au passage, l’importance de cette ZEE européenne repose surtout sur celle de la France, qui possède le second domaine maritime mondial, après les États-Unis…

Cela étant, et après avoir évoqué « l’Eurodôme », Thierry Breton a relancé une idée que l’on croyait passée de mode, depuis que l’ex-chancelière allemande, Angela Merkel, l’avait défendue. « À moyen-long terme, il sera inévitable de se poser la question d’un porte-avions européen ».

Pourquoi cette question serait-elle inévitable et pourquoi s’arrêter à un seul porte-avions? Le commissaire européen n’a pas développé davantage sa proposition… qui, tant à moyen qu’à long terme, est irréaliste.

Parler de « porte-avions européens » n’a effectivement pas de sens quand l’on sait que, parmi les vingt-sept membres de l’UE [dont certains n’ont pas d’accès à la mer], seulement trois pays ont une expérience en matière d’opérations aéronavales, à savoir la France, l’Italie et l’Espagne. Les Pays-Bas auraient pu en faire partie… mais ils ont abandonné cette capacité en même temps que leur porte-avions HNLMS Karel Doorman en… 1968.

Et encore, parmi les trois pays cités, seule la France dispose d’un porte-avions avec catapultes et brins d’arrêt [configuration CATOBAR], l’Italie et l’Espagne mettant en oeuvre des porte-aéronefs.

En clair, l’expérience – faire aponter un avion de chasse sur une piste de 260 mètres n’est pas un « sport de masse » – et les compétences qu’exigeraient ce « porte-avions européen » envisagé par M. Breton ne pourraient être fournies que par trois États membres, si ce n’est par un seul, tant au niveau opérationnel qu’industriel. Et c’est sans compter les investissements importants, les aspects technologiques, le choix des aéronefs, les ressources humaines, etc.

« Pour diverses raisons, il est compliqué de construire un porte-avions à partager, car chaque pays a ses spécificités culturelles », avait par ailleurs résumé l’amiral Jean-Philippe Rolland, alors qu’il était interrogé sur ce sujet, en mai 2019, lors d’une audition parlementaire.

Qui plus est, il faudra aussi aborder la question de la doctrine d’emploi… « Quand on a des bras puissants, il est préférable d’avoir un seul cerveau : l’emploi de la force suppose en effet une volonté ferme et une certaine constance », avait souligné l’amiral Rolland. À l’époque, la ministre des Armées, Florence Parly, n’avait pas dit autre chose. « Construire un porte-avions à plusieurs est une chose, le mettre sous un commandement européen en est une autre. Là, c’est beaucoup plus compliqué », avait-elle estimé.

En clair, et comme l’Union européenne n’est pas un État fédéral, il s’agit de savoir quel serait le contrôle opérationnel d’un tel navire, décrit comme étant un « outil de projection de puissance », sachant que chaque État membre a ses propres règles d’engagement.

En revanche, un groupe aéronaval « européen » est d’autant plus concevable que le porte-avions Charles de Gaulle favorise déjà les coopérations opérationnelles entre Européens, certains pays fournissant des frégates afin de constituer son escorte.

Photo : PANG; via Naval Group



[ad_2]

Source link

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *